Plus tôt ce mois-ci, une coalition nationaliste appelée Pè a Corsica (pour la Corse) a remporté le contrôle de l’assemblée régionale de l’île avec 56,5% des voix.

Le succès de Pè a Corse peut certainement donner plus de pouvoir de négociation à l’île vis-à-vis d’un gouvernement français résolument centraliste et représenter une autre région européenne cherchant à se frayer un chemin à partir d’un État-nation dominant.

Mais il est peu probable que cela conduise à une rébellion à la catalane.

L’histoire
Partie de l’Italie jusqu’en 1768, la Corse jouit d’une autonomie en France depuis 1982.

Le mouvement nationaliste de l’île tire ses origines des changements démographiques survenus au début des années 1960. Quelque 18 000 pieds-noirs (colons blancs d’Algérie) se sont installés en Corse durant ces années et ont repris sa lucrative industrie du vin. Beaucoup d’habitants d’origine sont revenus après l’effondrement de l’empire colonial français. Ils se sont retrouvés dans une position désavantageuse et leur langue corse natale menacée.

Les insulaires craignaient également la dégradation de l’environnement de la part de la France et de l’Italie. Le premier projetait d’utiliser la mine d’argent Argentella de Corse comme site d’essais nucléaires. Ce dernier déversait régulièrement des déchets toxiques au large de sa côte ouest.

Les manifestations ont culminé au milieu des années 1970 et les appels à l’indépendance se sont fait entendre. Des radicaux ont formé le Front de libération nationale de Corse, qui a mené des attaques en Corse et en France métropolitaine.

La violence continue d’entacher le mouvement nationaliste corse jusqu’en 2014. Sa cessation a facilité le rapprochement entre les partis en quête d’autonomie et ceux en quête d’indépendance.

Dépendance à la France
Bien que les nationalistes aient remporté la majorité, moins d’un Corsic sur deux a voté lors des élections.

Selon les sondages d’opinion, la majorité des 330 000 insulaires sont toujours favorables au maintien d’une relation avec la France.

De plus, la Corse est la région la moins développée de France et dépend fortement du tourisme et des dons de Paris. Les dirigeants corse le savent. Les nationalistes, Gilles Simeoni, ne réclament rien de proche de l’indépendance mais plutôt du dialogue « pour que la question corse soit réglée politiquement de manière pacifique et durable ».

Les demandes de la Corse
Pè a Corse fait trois demandes:

Statut égal pour la langue corse.
Une libération de prisonniers politiques.
Interdire aux étrangers d’acheter des propriétés corses.
La première est confrontée à un obstacle majeur: l’article 2 de la Constitution française stipule que «la langue de la République est le français».

Cette disposition est la raison pour laquelle la France n’a toujours pas ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Reste à voir si le gouvernement d’Emmanuel Macron est prêt à accepter la seconde demande.

Quant au troisième, le gouvernement français est impuissant à empêcher les étrangers d’acheter des terres en Corse, car cela relève de la compétence de l’UE.

Marcher avec soin
Tout aussi conscient de l’inertie du gouvernement français dans les affaires régionales, Simeoni a déclaré qu’il souhaitait passer outre la politesse de la première réponse française officielle (le Premier ministre Édouard Philippe l’a invité à se réunir à Paris) et poursuivre un vrai dialogue.

Pour l’instant, le gouvernement de Paris peut pousser un soupir de soulagement. Contrairement à son homologue à Madrid, il ne s’agit pas d’un soulèvement séparatiste.

Mais Macron et Philippe ne peuvent pas se reposer facilement. Le succès électoral des nationalistes corse les oblige à marcher prudemment. D’autres minorités régionales dans le « Hexagone » prendront note si les Corses extraient des concessions.

 

 

La Source: http://bit.ly/2nbQefU

Publisher: Lebanese Company for Information & Studies
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