Maya Samaha

Une polémique s’observe aujourd’hui entre les francophones en général et les enseignants de français en particulier, suite à la nouvelle orthographe qui sera mise en œuvre facultativement à la prochaine rentrée scolaire en France, à partir du mois de Septembre 2016.

A noter que cette réforme a été validée à l’unanimité par l’Académie française après que le Conseil national supérieur de la langue française l’a recommandé en 1990 pour résoudre des problèmes graphiques et dans le but d’éliminer des incertitudes et des incohérences, pour un apprentissage plus sûr.

Cependant, la polémique est remarquée récemment, il y a un quart de siècle après la publication de ces rectifications dans le Journal officiel de la République française, parce que le Conseil supérieur des programmes a décidé l’application systématique de ces rectifications orthographiques dans les livres scolaires.

Ladite réforme porte sur 2400 mots afin de simplifier la langue et faciliter son apprentissage comme l’accent circonflexe incarne par exemple une importante difficulté de l’orthographe selon l’Académie française.

De plus, cet ajustement met fin à certaines hésitations et incohérences difficiles à enseigner, supprime des anomalies et des difficultés et évite des pratiques aléatoires, tout en tenant compte de l’évolution d’une langue vivante. Ainsi, et dans ce contexte, les instances compétentes peuvent proposer certaines modifications de l’orthographe.

Nous rappelons que la langue française a subi plusieurs réformes contrairement à ce que certaines personnes pensent. Et la révision évoquée aujourd’hui n’est qu’une continuité des rectifications déjà opérées auparavant, aux XVIIIe et XIXe siècles.

Cette révision orthographique a poussé les éditeurs à se hâter pour préparer de nouvelles éditions des manuels scolaires car les programmes seront modifier pour les classes élémentaires et jusqu’à la troisième. Certaines maisons d’édition françaises ont déjà commencé à introduire progressivement la nouvelle orthographe depuis plusieurs années. Quant aux manuels français des classes secondaires, ils n’ont pas besoin d’une nouvelle rédaction parce qu’ils reproduisent des textes littéraires classiques.

Plusieurs internautes ont réagi sur les réseaux sociaux à travers l’utilisation du hashtag #Jesuiscirconflexe pour s’attacher à l’accent circonflexe et en considérant que le chapeau est inscrit dans l’histoire de la France.

Et suite aux vires réactions de certains intellectuels, la ministre de l’Education française Najat Vallaud-Belkacem a affirmé que l’accent circonflexe ne disparaît pas et que la nouvelle orthographe ne supprimera pas l’ancienne. Donc, l’orthographe classique reste admise et aucune des deux formes ne peut être tenue pour fautive.

 

Écoles françaises au Liban

Le responsable presse et communication au Grand Lycée Franco-Libanais, Ghassan Ayoub affirme à la revue Immar wa iktissad que tous les établissements scolaires appartenant à la Mission Laïque française au Liban vont appliquer ce nouveau programme d’enseignement à partir de la prochaine rentrée scolaire. Monsieur Ayoub a également indiqué que la préparation de ce nouveau programme a débuté depuis l’année dernière.

Pour sa part, le Collège Notre-Dame de Jamhour, dirigé par les pères jésuites, va adopter la réforme française de l’orthographe.

 

Établissements catholiques

D’autre part, et concernant les écoles catholiques au Liban qui mènent une même voie de développement dans leur programme d’enseignement, le secrétaire général des écoles Catholiques au Liban, le Père Boutros Azar a rappelé que les français eux-mêmes demeurent confus vis-à-vis de l’affaire de la réforme orthographique.

Le P. Azar ajoute que cette réforme est jusqu’à présent ambiguë aux niveaux éducatif et scientifique et elle nécessite une modification spéciale de la part du ministère de l’Education et de l’Enseignement supérieur pour qu’elle soit adoptée.

 

Le CRDP

Le Centre libanais de recherche et de développement pédagogiques, responsable de la production et de l’adoption des livres scolaires et autres publications ou auxiliaires pédagogiques indique à notre revue qu’aucune décision n’a été prise jusqu’à présent quant à l’adoption ou non de ladite réforme.

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De même, nous avons constaté que rien n’a été conclu jusqu’à maintenant dans le ministère libanais de l’Education et de l’Enseignement supérieur concernant cette affaire.

 

Réaction des profs

Une enseignante de français depuis vingt ans dans une école privée nous a signalé qu’elle est tout à fait contre cette réforme « qui ne facilite pas l’orthographe. C’est la régression de la langue française qui se met à l’ordre du jour. La difficulté de l’orthographe réside dans les règles et non dans les mots d’usage », selon elle.

Ce prof expérimenté a révélé qu’«il faut respecter et sauvegarder la traduction d’une langue quelque soit sa complexité et cela pour mieux comprendre les œuvres rédigées tout au long de l’histoire de la littérature ». Elle a espéré en outre que cette réforme ne sera jamais applicable au Liban.

Au contraire, une autre enseignante voit que la nouvelle orthographe supprime de nombreuses incohérences et incarne l’évolution indispensable de la langue française comme cette dernière est l’une des orthographes les plus difficiles au monde, nécessitant donc une révision continue.

 

La presse francophone       

Par ailleurs, et concernant l’avis de la presse francophone au Liban, et son comportement vis-à-vis de cette affaire, le chef du Service des informations locales du seul quotidien libanais d’expression française L’Orient-Le Jour, Tilda Abou Rizk souligne que «la question n’est pas encore envisagée à L’Orient-Le Jour et je ne pense pas qu’elle le sera tant que cette réforme n’est pas officialisée».

Mme Abou Rizk ajoute que si cette réforme reste facultative, «il est évident que la rédaction se concertera pour uniformiser une fois pour toutes l’orthographe des mots à adopter, comme elle le fait actuellement pour les noms propres».

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Quelques rectifications présentées par la nouvelle réforme:

-Les numéraux composés seront systématiquement reliés par des traits d’union. (Ancienne orthographe: vingt et un, nouvelle orthographe: vingt-et-un; deux cents: deux-cents).

-Certains mots ont perdu leur trait d’union. Ainsi, la soudure est privilégiée dans quelques mots composés (Porte-monnaie: portemonnaie- Mille-pattes: millepattes- Week-end: weekend).

– Au pluriel des noms composés du type pèse-lettre ou sans-abri, le second élément seulement prend la marque du pluriel: (Des après-midi: des après-midis).

-L’accent circonflexe sur le « i » et le « u » peut être supprimé de certains mots: (Maîtresse: maitresse- Coût: cout- S’entraîner: s’entrainer- Paraître: paraitre).

-L’accent grave est employé à la place de l’accent aigu dans quelques mots et au futur et au conditionnel des verbes qui se conjuguent sur le modèle de céder: (Evénement: évènement- Réglementaire: règlementaire- Je céderai: je cèderai)

-Le tréma est déplacé sur la lettre u prononcée dans les suites « güe » et « güi » : (Aiguë: aigüe)

-Une rectification aura lieu pour certains problèmes graphiques: (Oignon: ognon- Nénuphar: nénufar)

-Le pluriel des mots empruntés se forme dorénavant de la même manière que les mots français (des matches: des matchs).

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Il semble que ces rectifications, proposées sont forme de recommandations, porteront notamment sur les manuels scolaires mais elles concernent aussi les professionnels de la communication et tous les francophones. Et malgré que les deux orthographes restent acceptables, les enseignants seront confus surtout dans les écrits des élèves.

Et du point de vue économique, la réforme qui sera intégrée dans la neuvième édition du dictionnaire de l’Académie française, déclenchera des coûts supplémentaires par rapport au renouvellement des livres des étudiants et des enseignants, outre les dépenses attribuées à la révision des ouvrages.

Le Liban, occupé par d’autres affaires, est comme toujours en retard et n’est pas directement concerné jusqu’à présent par cette révision orthographique, sauf en ce qui concerne les établissements qui suivent le programme d’enseignement français.

Les élèves soumis à ce programme auront enfin le droit de s’interroger: est-ce qu’il aura une rétroactivité pour les points perdus dans certaines dictées?

 

En coopération avec « Immar wa iktissad »

 

 

 

Publisher: Lebanese Company for Information & Studies
Editeur : Société Libanaise d'Information et d’Etudes
Rédacteur en chef : Hassan Moukalled


Consultants :
LIBAN : Dr. Zaynab Moukalled Noureddine, Dr Naji Kodeih
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EGYPTE : Ahmad Al Droubi
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