Tirant profit de sa position géographique, le Kenya a résolument pris le pari de la géothermie, une source d’énergie propre, renouvelable et plutôt bon marché, dont il espère qu’elle lui permettra à terme de garantir son approvisionnement en électricité.
Actuellement, à peine plus d’un tiers des 45 millions de Kényans ont l’électricité. Et les coupures de courant sont fréquentes sur tout le réseau, y compris dans la capitale Nairobi.
Le gouvernement kényan a fait de la couverture électrique du pays l’une de ses priorités. Il entend tripler sa capacité de production d’ici 2020, pour compenser une hausse annuelle de la demande de 11%.
Pour cela, le Kenya mise sur la géothermie, profitant de la spécificité géologique de la vallée du Rift, cette faille de plus de 6.000 kilomètres de long qui traverse le pays et court jusqu’en Afrique australe.
Son immense potentiel, disséminé sur 14 sites éparpillés tout au long du Rift, est estimé à 10.000 mégawatts (MW). Même s’il est encore sous-exploité, il suffit déjà à en faire l’un des leaders mondiaux en matière de géothermie.
En installant en 2015 deux nouvelles unités de production à Olkaria, à 120 km au nord-ouest de Nairobi, le Kenya a plus que doublé sa production d’énergie géothermique, à 609 MW, soit plus d’un quart de sa production électrique totale. Le Kenya pointe désormais au 8e rang mondial pour la géothermie avec 5% de la production.
Olkaria, située dans le parc national de Hell’s Gate, est la plus grande usine de géothermie d’Afrique. Sur les collines arborées courent un lacis de canalisations menant à des puits de forage d’où émergent des fumerolles blanches.
L’énergie géothermique provient d’un mélange d’eau et de vapeur sous pression, puisée à près de 2 km sous terre. Grâce à sa pression et sa chaleur, la vapeur d’eau, séparée de l’eau lorsqu’elle remonte à la surface, fait tourner des turbines couplées à un générateur pour produire de l’électricité.
La région est particulièrement propice à ce procédé car, au niveau du Rift, créé par l’expansion de la plaque tectonique, l’écorce terrestre est plus fine qu’ailleurs.
« L’énergie géothermique peut apparaître probablement partout dans le monde. Mais ce qui la rend plus accessible ici, c’est que l’écorce terrestre est plus mince, si bien que la vapeur peut sortir très facilement », explique Boniface Kipkorir, un ingénieur travaillant sur le site.
« C’est une énergie propre, ou verte, car son empreinte carbone sur l’environnement est minimale », ajoute cet employé de KenGen (Kenya electricity generating company), le plus gros producteur d’électricité du pays.
Pendant longtemps, le Kenya s’est reposé sur son réseau hydroélectrique (encore 820 MW en 2015). Mais les sécheresses à répétition ont rendu cette source d’énergie beaucoup moins sûre qu’auparavant.
« Ces deux dernières années, le niveau des réservoirs a beaucoup baissé. Il a fallu diminuer le volume d’électricité produite. Ce n’est pas pareil avec la géothermie. C’est une source d’approvisionnement très fiable », note Albert Mugo, le directeur général de KenGen.
La géothermie est une source d’énergie renouvelable, car l’eau récupérée et la vapeur d’eau condensée après son passage dans les turbines sont ensuite réinjectées sous terre, d’où elles pourront refaire le même trajet.
« Cette tendance va continuer à se confirmer, parce que si vous regardez les projets qui arrivent, il y a plus de géothermique qui va être installé et très peu d’hydroélectrique », ajoute M. Mugo.
Dans son plan « Vision 2030 », destiné à faire du Kenya un pays à revenu intermédiaire en 2030, le gouvernement estime que la capacité de production électrique sera alors de 17.500 MW (contre 2.200 en 2015).
Il espère que 5.000 MW proviendront de la géothermie, qui serait ainsi la première source d’énergie, devant le thermique (4.500 MW), le nucléaire (4.200), l’hydroélectricité (2.200 MW) et l’éolien (1.600).
Cela pourrait avoir pour conséquence une baisse du coût de l’électricité, qui a déjà diminué de 30% entre 2014 et 2015. Si les investissements initiaux sont lourds, la géothermie est en effet ensuite une énergie relativement économique.
AFP