Il fut le parolier attitré de Bashung avec des succès comme « Gaby Oh Gaby » ou « Vertige de l’amour » mais le prolifique et éclectique Boris Bergman a aussi fait chanter Demis Roussos, Eddy Mitchell, Christophe ou même Dalida.
Une riche compilation de trois CD, sortie vendredi, retrace l’œuvre de ce parolier polyglotte d’origine russe et de nationalité britannique, né à Londres en août 1944 et installé en France depuis l’âge de 13 ans. Son premier succès fut en anglais avec « Rain and tears » des Aphrodite’s Child et il a signé de nombreuses adaptations du français vers l’anglais (Gainsbourg, Bashung) ou l’inverse (Bowie, Buddy Holly).
Avec « Rain and tears », chanson écrite en 1968 sur une musique adaptée d’un Canon de Pachelbel, « on m’a présenté comme un auteur d’origine franco-anglaise, né en Angleterre, qui avait écrit un texte en anglais pour un groupe grec sur un morceau classique allemand… », se souvient le parolier de 71 ans, en recevant l’AFP dans son appartement chaleureux posé au pied de la butte Montmartre, à Paris.
Parolier, « Bobo » l’est devenu par goût du mot juste sans parvenir, aujourd’hui encore, à y voir un « métier ».
Ses mots ont accompagné 50 ans de variétés avec des interprètes comme Juliette Gréco, Dalida, Nana Mouskouri, Christophe, Paul Personne, Jean-Louis Aubert, Johnny Hallyday ou Christophe Maé, tous présents sur la compilation, mais d’autres également comme France Gall, Richard Anthony ou Patrick Juvet.
Mais la rencontre qui a changé le cours de sa carrière fut évidemment celle avec Alain Bashung dans les années 70. Bashung n’a alors rien d’une vedette et va enfin connaître quelques succès avec les mots de celui qu’il surnomme affectueusement « Pépère ».
– ‘Un fakir en transe’ –
« On était des chevaux de retour, des +has been+, quand on a travaillé ensemble. Et on s’est remis en selle, je sentais qu’on était en train de faire un truc qui n’avait jamais été fait ici », explique Bergman.
« Gaby Oh Gaby », en 1980, est la chanson qui sauve la carrière de Bashung, au moment où sa maison de disques songe à lui rendre son contrat pour manque de retombées commerciales. « Alain avait repris un texte que j’avais fait, qui s’appelait +L’après-midi d’un Max Amphibie+. La chanson est passée dans les émissions de nuit sur France Inter puis sur Europe 1 », se souvient le parolier.
Entre les deux amoureux de rock et de blues, il y aura une première séparation, des retrouvailles pour l’album « Passé le Rio Grande » (1986) et une nouvelle séparation après « Novice » (1990) et ses paroles un peu désabusées (dans la chanson « Alcaline »): « Où veux-tu qu’j’te dépose?/Tu m’as encore rien dit/T’aimes plus les mots roses/Que je t’écris? »
« Je ne dois rien à Alain, il ne me doit rien, mais nous nous devons beaucoup », estime le parolier.
L’un des trois cd est entièrement consacré à Bashung, avec des chansons tirées des albums originaux mais aussi des reprises, certaines rares voire inédites, de Hubert-Félix Thiéfaine, Carla Bruni, Jimmy Cliff, Keren Ann ou Christophe.
Un autre disque de cette compilation « Grandes plumes de la chanson » (Universal) regroupe ses chansons en français pour d’autres interprètes et le troisième rassemble les chansons en anglais ou adaptations en français de titres anglais. Soit un tout petit aperçu d’une oeuvre qui, au total, pourrait compter quelque « 1.200 chansons enregistrées ».
« L’inspiration, je ne sais pas d’où ça vient, je travaille en général comme un fakir en transe », souligne celui qui a aussi écrit des chansons pour des séries télévisées, ainsi que des scénarios et des pièces de théâtre.
S’il avait un regret, finalement, ce serait peut-être de voir que les auteurs et les compositeurs sont de moins en moins cités par les interprètes. « On a cessé de citer les auteurs et compositeurs à partir du moment où ne pas être auteur-compositeur-interprète est devenu une tare. Edith Piaf, ça ne la dérangeait pas… »
AFP