Le Sénat à majorité de droite a adopté en deuxième lecture dans la nuit de jeudi à vendredi le projet de loi biodiversité après l’avoir édulcoré, reculant en particulier sur la taxation de l’huile de palme, ainsi que sur les pesticides néonicotinoïdes, considérés comme nocifs pour les abeilles.
Les sénateurs avaient été beaucoup plus audacieux en première lecture.
Seuls 208 d’entre eux, sur 341, se sont prononcés à l’issue du nouveau débat. 156, Les Républicains, centristes, RDSE (à majorité PRG) ont voté pour, et 52 contre, 21 LR, une centriste, Chantal Jouanno, les Communistes républicains et citoyens (CRC), et les écologistes. Les socialistes se sont abstenus.
Le texte doit faire à présent l’objet d’une commission mixte paritaire chargée de trouver une version commune avec l’Assemblée. En cas d’échec, les députés auront le dernier mot après une nouvelle lecture.
« J’attendais beaucoup de cette lecture au Sénat, on m’avait en effet vanté le débat constructif et respectueux de la première lecture et j’espérais un débat de la même qualité », a dit la secrétaire d’État à l’environnement Barbara Pompili. Mais « les convictions chevillées au corps de la secrétaire d’État que je suis sont un peu déçues », a-t-elle dit. « Je regrette que l’on en soit encore à des considérations que je croyais dépassées ».
« L’esprit de compromis qui avait prévalu en première lecture ne s’est pas retrouvé lors de cette deuxième lecture et les lobbys de la chimie, de l’agro-industrie, de la chasse et du béton ont pesé de tout leur poids pour freiner toute reconquête de la protection de la biodiversité », a accusé le chef de file écologiste pour le texte, Ronan Dantec.
En revanche, le président de la commission du développement durable Hervé Maurey (UDI-UC) a vu «deux acquis importants de cette lecture: la création du préjudice écologique d’une part; les néonicotinoïdes d’autre part ». Le Sénat s’est prononcé jeudi pour une diminution progressive de ces derniers, mais sans fixer de date limite comme le souhaitait le gouvernement.
« Nous nous réjouissons de la reconnaissance du préjudice écologique », a déclaré pour le PS Jean-Jacques Filleul. « Mais le principe de zéro perte nette, de non régression de la biodiversité, a malheureusement disparu comme les dispositions sur la bio-piraterie, la taxe sur l’huile de palme et les gains de biodiversité ».
« Le débat a bien peu tenu compte de la science qui démontre sans ambiguïté que la biodiversité s’effondre, que les pertes s’accélèrent en Ile-de-France », a estimé Chantal Jouanno.
« Nous avions un beau texte, ce n’est plus le cas. La biodiversité diminue », a estimé Evelyne Didier (CRC). « Certes, nous avons avancé sur le préjudice écologique, mais il a fallu pour cela qu’un président particulièrement concerné s’implique », a-t-elle dit, en faisant allusion au rôle du patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, dont le département, la Vendée, avait été particulièrement impacté par la catastrophe due au naufrage du pétrolier Erika de Total en 1999.
Pour Sophie Primas (LR), « c’est à l’Assemblée nationale que les grands équilibres ont été rompus. Le débat n’est pas fini et nous continuerons à travailler », a-t-elle conclu.
AFP