« Lorsque les gens iront sur Mars, ils devront manger. Et le plus facile pour eux sera de cultiver leurs propres aliments ». Dans une serre perdue au milieu d’un champ aux Pays-Bas, s’étirent de banales plantes vertes dans des pots de terre aux caractéristiques extraterrestres.

Wieger Wamelink, chercheur à l’université de Wageningen, dans l’est des Pays-Bas, n’en est pas à son coup d’essai. Dans une terre rouge similaire au sol de l’aride et rocailleuse Mars, il a déjà réussi à cultiver du cresson, des radis et du seigle, et rêve maintenant de tomates fraîches mûries aux lampes LED sur cette planète lointaine.

Obtenir un peu de véritable sol martien est « impossible », explique le scientifique. C’est pourquoi il a passé commande sur internet… auprès de la Nasa, l’Agence spatiale américaine.

La Nasa fabrique en effet des ersatz, explique le scientifique, qui s’en sert désormais pour ses expériences agricoles. La terre carmin imitant le sol de Mars est puisée près d’un volcan à Hawaï. Le succédané lunaire provient, lui, d’un désert d’Arizona.

Les recherches de Wieger Wamelink ont débuté en 2013 avec la commande de 100 kg de ces sols pseudo-lunaire et pseudo-martien, moyennant 2.000 euros.

Le chercheur a d’abord semé quatorze espèces de plantes, parmi lesquelles des tomates, des légumineuses et des plantes sauvages.

« Travailler cette terre est très spécial. Personne, pas même la Nasa, n’était capable de nous dire ce qu’il se passerait, même en y ajoutant simplement de l’eau », se souvient M. Wamelink, dont les recherches ont été détaillées dans le journal scientifique PLOS One en août 2014.

Ces sols de substitution, « un peu réticents », absorbent finalement bien l’eau et se révèlent être un bon terreau. « Sur le succédané martien, les plantes poussaient très vite et très bien et ont même commencé à fleurir, chose que nous n’avions pas anticipée », assure-t-il.

Dès la deuxième expérience, toutes les plantes ont poussé dans les deux sols, même si les épinards ont été plus capricieux.

Des légumes empoisonnés ?

Reste toutefois LA question à laquelle Wieger Wamelink cherche aujourd’hui à répondre: ces légumes sont-ils propres à la consommation?

Comme parfois sur la planète bleue, la terre martienne contient des métaux lourds qui, inoffensifs pour la croissance des plantes, peuvent être des poisons mortels pour l’être humain.

Jour après jour, Wieger Wamelink observe et compare la croissance ici des haricots, là des pommes de terre, clin d’oeil au film « Seul sur Mars » dans lequel l’astronaute incarné par Matt Damon tente de survivre sur la planète rouge.

Les analyses menées dans le cadre de ses expériences révèlent de l’arsenic, du mercure ou du plomb dans les légumes, les rendant impropres à la consommation… mais le chercheur pense avoir déjà trouvé la solution: il faudrait purifier d’abord le sol, dit-il, en introduisant des espèces végétales comme la violette capables d’extraire les métaux lourds.

Pour l’instant, l’expérience de Wieger Wamelink, menée dans des conditions non stériles sur Terre, ne porte que sur les qualités nutritionnelles de la terre. « Il reste tant d’autres paramètres à tester », assure-t-il, avant que l’agriculture ne devienne une réalité dans l’espace.

En raison du froid intense et du manque d’oxygène sur Mars et sur la Lune, les légumes et légumineuses ne pourraient y être cultivés que dans un environnement clos et contrôlé: il faudrait un équipement récréant les conditions atmosphériques de la Terre et qui protège contre les radiations cosmiques susceptibles d’endommager l’ADN des plantes, relève le scientifique.

Cette « ferme spatiale » pourrait par exemple prendre la forme d’un conteneur, équipé de lampes LED et enfoui en sous-sol.

Quant à l’eau, nécessaire pour faire pousser les plantes, « il en existe sur Mars et sur la lune sous forme de glace », relève Wieger Wamelink.

Certaines questions restent toutefois en suspens et ne pourront être totalement résolues qu’une fois là-haut, concède-t-il: l’ajout de bactéries bienfaisantes aiderait-elle les plantes à croître ? quel impact aura la faible gravité sur la croissance des plantes ?

La Nasa prévoit que l’homme pourra marcher sur Mars d’ici 10 ou 15 ans, un horizon qui est aussi celui des projets de colonie humaine Mars One et Mars Colonial Transporter du milliardaire Elon Musk, fondateur de la société aérospatiale californienne SpaceX.

Celle-ci compte envoyer une capsule non habitée vers la planète rouge dès 2018 avec le soutien technique de la Nasa.

Mais la route sera longue avant qu’on ait la technologie permettant de « maintenir l’astronaute en vie » sur Mars, commente Christophe Lasseur, responsable des recherches en « Support-Vie » – l’ensemble des activités autour des besoins métaboliques de l’astronaute – à l’Agence spatiale européenne (ESA).

Et à ses yeux, faire pousser des plantes dans le sol martien « n’est pas une priorité »: plus important serait, dit-il, de pouvoir installer sur place des laboratoires où seraient cultivés des légumes assurés de pousser et comestibles à coup sûr.

« On ne peut pas prendre de risques. On est obligé de considérer la plante comme une technologie et de savoir exactement ce qu’il se passe, de la racine au bout de la feuille », dit-il.

Avant d’espérer voir pousser des tomates à Mars, « tous les paramètres chimiques, microbiologiques, physiologiques doivent être compris et modélisés », conclut M. Lasseur.

AFP

 

Publisher: Lebanese Company for Information & Studies
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