Dépister le cancer du sein précocement grâce à l’odorat des chiens pour un coût bien inférieur aux examens cliniques actuels: c’est l’ambition du projet Kdog, initié par l’entreprise d’expertise cynophile ITDC, basée en Haute-Vienne, et porté par l’Institut Curie.
Dès septembre, Thor et Nykios, deux chiens de berger malinois, feront une rentrée des classes un peu particulière à Magnac-Laval (Haute-Vienne). Sous la férule de Jacky Experton, pionnier des techniques cynophiles et fondateur de l’International Training Dog Center (ITDC), les deux chiens, achetés par l’Institut Curie pour ce projet, apprendront à reconnaître l’odeur du cancer du sein.
« Un chien peut emmagasiner un catalogue d’odeurs presque infini ! », lance M. Experton, qui a notamment dressé les premiers chiens détecteurs de stupéfiants et d’explosifs de l’armée de l’air.
Lors d’une première phase, les chiens seront exposés à deux types de prélèvements odorants. Le premier sera dressé sur des tissus imprégnés de la transpiration des patientes, son congénère directement sur des prélèvements de tumeurs.
Chaque session sera filmée et c’est Jacky Experton qui décodera pour l’Institut Curie le comportement des chiens face au stimulus odorant.
Puis les chiens intervertiront leur rôle. Cette seconde étape vise à confirmer la présence des mêmes composés volatiles du cancer du sein dans la sueur ou les tumeurs, en quantité différente mais toujours détectable par l’odorat du chien.
Viendra alors le temps des tests « en aveugle »: l’Institut Curie enverra à Jacky Experton et ses chiens des tissus tests numérotés mais ne mentionnant pas s’il s’agit de patientes malades ou indemnes. « Le croisement des données permettra de dire si le chien a marqué les bons prélèvements ou pas », explique l’expert cynophile.
Si les résultats sont concluants, l’institut Curie envisagera un essai clinique impliquant une plus grande cohorte de patients.
« Si notre postulat se vérifiait, les bénéfices seraient immenses », souligne la biologiste Aurélie Thuleau, chef du projet Kdog. Car le flair des chiens est par nature non invasif, extrêmement mobile, très peu coûteux et constituerait une solution de dépistage idéale, dans une perspective humanitaire par exemple.
L’étude préliminaire, qui durera 6 à 9 mois selon le rythme des progrès des chiens, est financée par le seul Institut Curie, qui a levé 100.000 euros par le biais du mécénat.
C’est en découvrant que des études prometteuses avaient été menées sur les cancers de la prostate à partir des composés odorants laissés par la maladie dans l’urine des patients que Jacky Experton a eu l’idée du projet.
Une étude pilote réalisée en Autriche avait ainsi suggéré en 2012 que les chiens étaient étonnamment doués pour détecter les cancers du poumon grâce à leur odorat.
Lors de tests menés en partenariat avec un service de pneumologie de l’hôpital de Krems (nord-est de l’Autriche), les chiens avaient respiré 120 échantillons d’haleine provenant de patients ou de personnes saines. Ils avaient identifié avec un taux de réussite de 70% ceux qui étaient atteints d’un cancer du poumon, un succès recoupant des essais déjà réalisés par le passé aux Etats-Unis ou en Allemagne.
AFP