L’épidémie de Zika en Amérique latine va probablement s’éteindre d’elle-même dans les deux à trois ans et la prochaine grande flambée ne devrait pas se produire avant dix ans, selon des chercheurs.
La pandémie actuelle sur le continent latino-américain ne peut pas être contenue par les moyens existants de contrôle, concluent également ces scientifiques britanniques de l’Imperial College à Londres, dont les travaux paraissent dans la publication américaine Science.
Les chercheurs soulignent le grand nombre de zones d’ombre qui subsistent sur ce virus,- responsable de cas de malformations congénitales chez les nourrissons -, et d’autres de la même famille, comme la dengue.
Il n’existe à ce stade aucun vaccin ni antiviral contre le Zika, transmis principalement par des moustiques Aedes aegypti mais qui peut aussi se transmettre sexuellement. Le Brésil est particulièrement touché, avec plus de 1,5 million de personnes infectées.
Selon le modèle mathématique utilisé, la prochaine épidémie du virus Zika ne devrait pas se produire avant au moins dix ans mais de petites flambées sont possibles entre temps.
« Nos analyses suggèrent que la propagation de l’infection par le Zika ne peut pas être contenue et que l’épidémie s’éteindra d’elle-même dans les deux à trois ans », explique le professeur Neil Ferguson, de la faculté de santé publique de l’Imperial College, principal auteur de ces travaux.
« Cette étude exploite toutes les données disponibles pour comprendre comment cette épidémie va évoluer, ce qui permet d’évaluer la menace », ajoute-t-il.
Etant donné que le virus ne peut pas infecter la même personne deux fois grâce au système immunitaire qui produit des anticorps, l’épidémie atteint un stade où il y a trop peu de personnes n’ayant pas encore été infectées pour que la transmission se poursuive, expliquent ces chercheurs.
C’est la raison pour laquelle une nouvelle épidémie de grande ampleur ne peut pas redémarrer avant au moins dix ans, quand une nouvelle génération n’aura pas encore été exposée au Zika.
Cette évolution est similaire à celle observée pour d’autres épidémies dont celle du chikungunya, un virus similaire au Zika, pour laquelle on a pu observer des flambées explosives suivies de longues périodes avec seulement quelques cas.
La fin de l’épidémie de Zika serait bien sûr une bonne chose, mais poserait aussi des problèmes pour le développement en cours de vaccins, relève le professeur Ferguson.
« Si nos projections sont exactes, le nombre de cas de Zika aura nettement diminué d’ici la fin 2017 voire avant et cela signifie que nous aurons alors des vaccins prêts à être testés et pas assez de cas d’infection dans la population pour faire des essais cliniques », craint Neil Ferguson.
De nombreuses questions restent en outre sans réponse sur le Zika.
« Malgré le fait que nous connaissons l’existence de cette maladie depuis près de 70 ans, nous avons été totalement surpris par cette flambée, accélérant nos recherches pour tenter de comprendre comment le Zika a envahi aussi rapidement l’Amérique du sud », commente Justin Lessler, un épidémiologiste à la faculté américaine de médecine Johns Hopkins de Baltimore, co-auteur d’une perspective sur le Zika publiée dans Science.
Le virus a été identifié en 1947 en Ouganda chez des singes et le premier cas d’infection humaine a été confirmé six ans après au Nigeria.
Une possibilité pour expliquer la rapide propagation du Zika en Amérique du sud serait le climat puisque l’épidémie a coïncidé avec la résurgence du courant équatorial chaud du Pacifique El Niño, notent les chercheurs.
Le fait que ces populations aient déjà été exposées à la dengue –un virus de la même famille que le Zika– pourrait aussi avoir joué un rôle important dans cette épidémie.
Plusieurs études laissent ainsi penser qu’une précédente exposition à la dengue pourrait amplifier une infection par le Zika.
Le Zika a retenu l’attention des autorités sanitaires mondiales en raison du risque sérieux qu’il présente pour les femmes enceintes car il peut provoquer des malformations irréversibles à la naissance dont surtout la microcéphalie du foetus, un développement insuffisant du cerveau.
Chez l’adulte, l’infection est dans la plupart des cas bénigne, passant souvent inaperçue.
Dans de rares cas, il est lié au syndrome de Guillain-Barré qui peut provoquer une paralysie momentanée.
AFP-Jean-Louis SANTINI