Des représentants des candidats Benoît Hamon, Emmanuel Macron et François Fillon ont débattu du volet numérique de leurs programmes, ce 9 mars au matin, à la Maison de la Mutualité. C’est la première fois qu’ils abordent ce volet de leur programme, à moins de deux mois du premier tour des élections. Mais avec timidité.
Le numérique entre timidement dans le programme de campagne des candidats à l’élection présidentielle. Ce 9 mars au matin, un débat sur le sujet était organisé à la Maison de la Mutualité par France Numérique, un collectif tout juste mis sur pied par huit organisations professionnelles et associations du numérique, telles France Digitale, Tech in France, le Syntec numérique, et le Syndicat national du jeu vidéo (SNJV). Au rythme des tables rondes, les équipes de trois des candidats, Benoît Hamon, Emmanuel Macron et François Fillon, ont parlé financement de l’innovation, cadre réglementaire, formation, et transformation du monde du travail. Et ont ainsi ébauché les programmes numériques de leurs candidats.
Mais pour ce premier débat sur le sujet, à moins de deux mois du premier tour des élections, les positions et propositions sont encore parfois floues. Même si plusieurs des candidats ont mis leur programme numérique en ligne, tels Emmanuel Macron et François Fillon. Ce dernier avait déjà ébauché son programme numérique lors de la campagne des primaires de droite. Au rythme d’une campagne électorale particulièrement mouvementée, marquée dès ses débuts par des primaires tardives, « les équipes de campagne ne sont pas toujours très carrées dans leur composition, avec des responsables numériques parfois difficiles à identifier », lâche un organisateur de Tech In France. Avec par exemple, dans le secteur numérique, la défection-surprise de la députée (Les Républicains) Laure de la Raudière de l’équipe de François Fillon, le 1er mars. Et l’arrivée d’Axelle Lemaire, ex-secrétaire d’Etat du numérique, dans l’équipe de Benoît Hamon il y a seulement quelques jours. Seul Emmanuel Macron avait d’ailleurs pris la peine d’envoyer une brève allocution vidéo, où il ébauchait son programme numérique !
Souveraineté numérique
Premier sujet à débat, la souveraineté numérique. Un concept qui a émergé ces derniers mois, autour de la question de la souveraineté des nations sur la gestion de leurs données face à la toute-puissance des GAFA. Pour la sénatrice écologiste Corinne Bouchoux, de l’équipe de campagne de Benoît Hamon, la question de l’installation du cloud souverain en France est « presque un sujet républicain ». Et elle regrette qu’il n’y ait » pas de grand acteur français de la cybersécurité « .
Pour le candidat Emmanuel Macron, la souveraineté numérique passe par la renégociation avec les Etats-Unis, d’ici 2018, des termes du Privacy Shield, le cadre de protection des données personnelles. Il souhaite aussi créer » les instruments d’une transparence sur l’usage des données privées par les acteurs du numérique ». Pour l’entrepreneur Eric Pilat, qui a planché avec François Fillon sur son programme numérique dès les primaires de droite, c’est l’Europe qui doit se positionner sur ce sujet. « L’Europe doit reprendre la maîtrise de sa souveraineté numérique. On compte 120 supercalculateurs en Europe, contre 171 aux Etats-Unis et autant en Chine. Cette dernière y a investi 160 milliards de dollars ».
En revanche, les trois candidats s’accordent sur l’indispensable accélération de la couverture de l’ensemble du territoire en très haut débit, pour lutter contre les inégalités d’accès. » La carte du vote Front National est la carte inversée de l’avancement du très haut débit « , constate Corinne Bouchoux.
Soutien aux start-up
Dans leur escarcelle, les candidats n’ont pas oublié les cadeaux fiscaux et mesures de soutien aux start-up. François Fillon propose une déduction d’impôts de 30% sur les montants investis dans des start-up jusqu’à 1 million d’euros d’investissements. Emmanuel Macron prône une harmonisation des règles au sein d’un « marché unique du numérique », et la création d’un Fonds européen de financement en capital-risque de 5 milliards d’euros pour favoriser les start-up européennes », détaille la députée (PS) Corinne Erhel, membre de son équipe de campagne. Il propose aussi un fonds dédié à l’intelligence artificielle de 10 milliards d’euros.
En matière de financement, Benoît Hamon propose de consolider le rôle de la BPI, pour « renforcer les aides au développement des TPE-PME-PMI ». Une mesure semblable est présente dans le programme d’Emmanuel Macron, puisqu’il entend concentrer entre les mains de la banque d’investissement » la gestion de l’ensemble des aides à l’innovation de l’Etat et de ses opérateurs « .
Les bouleversements que connaît le monde du travail, à l’ère de l’économie collaborative et de la désintermédiation, ont aussi suscité des réflexions chez les candidats. Emmanuel Macron table ainsi sur un ambitieux plan de formation professionnelle de 50 milliards d’euros: « cela va nous endetter, mais c’est de la bonne dette. Il ne s’agit pas de protéger les emplois mais les individus par la formation », argumente Mounir Mahjoubi, qui a quitté fin janvier la présidence du Conseil national du numérique pour conseiller le candidat sur son programme numérique.
Autre point de consensus entre eux, la suppression du régime spécial des indépendants. Il s’agit de permettre aux entrepreneurs indépendants de pouvoir cotiser sur le régime général des retraites, et mettre fin à un système jugé trop complexe. François Fillon va jusqu’à proposer de créer une caisse de protection dédiée, d’ouvrir et la création d’un statut d’autoentrepreneur irrévocable pendant 3 ans.