Des médecins prêtent main-forte aux territoires moins bien desservis
Certaines régions du Québec répondent mieux que d’autres aux demandes d’aide à mourir, au point où leurs médecins vont parfois prêter main-forte dans d’autres territoires moins bien desservis pour répondre aux patients. La formation des médecins et la collaboration étroite des équipes à domicile semblent être la clé pour offrir un accès adéquat à ce soin de fin de vie.
« On a toujours pu répondre à la demande et ça augmente sans cesse », convient Yvan Gendron, président-directeur général du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal où l’on a traité quarante-deux demandes d’aide à mourir dans les six derniers mois de 2016.
Selon M. Gendron, « quelques » médecins de sa région ont même déjà « aidé » d’autres territoires moins bien pourvus à répondre aux demandes des patients qui y réclamaient l’aide à mourir. Cette collaboration « spontanée » ne s’est pas faite de façon officielle, mais dans un cadre informel entre collègues, insiste-t-il. « Il y a une communauté de pratique qui échange sur son expérience et qui s’entraide », dit-il.
Plus de 1500 employés (médecins, infirmières et préposés) de ce CIUSSS ont reçu une formation sur l’aide à mourir depuis l’entrée en vigueur de la loi. Sur le territoire, environ 1000 personnes choisissent chaque année de mourir à domicile, et les liens qui unissent déjà CLSC et hôpitaux semblent jouer un rôle de premier plan dans la capacité à traiter les demandes.
« Si la personne est en grande douleur, on peut répondre en 24 heures. Des gens sont de garde et le GIS [Groupe interdisciplinaire de soutien] est prêt à nous soutenir en tout temps », affirme M. Gendron.
Accompagner pour former
La Montérégie a aussi fait face à une forte hausse des demandes d’aide à mourir (AMM). Le CIUSSS de la Montérégie-Ouest, qui avait reçu six demandes de janvier à juin 2016, a vu ce nombre tripler dans la seconde moitié de l’année. Mais la région présente malgré tout le taux de refus le plus bas au Québec, tout de suite après l’Estrie.
Selon la Dre Lucie Poitras, directrice des services professionnels de cet établissement, les demandes « continuent d’augmenter. Elles sont là, elles sont valides, et on s’est arrangés pour être disponibles à toute heure du jour, même le samedi et le dimanche, pour répondre aux besoins des familles ».
Lors du premier cas survenu en 2016, la Dre Poitras a eu du mal à trouver un collègue volontaire, malgré la formation donnée aux médecins. Elle a dû administrer elle-même l’AMM, mais a pris soin d’être accompagnée d’un confrère.
« Cet accompagnement est crucial pour former d’autres médecins et obtenir l’adhésion. À chaque nouvelle demande, un médecin en accompagne un autre. Après avoir vécu une première expérience, cela a complètement démystifié cette approche pour plusieurs médecins », dit-elle.
Dans ce secteur, on a d’ailleurs choisi de ne pas créer « d’équipe volante » pour administrer l’aide à mourir.
« Le médecin traitant est favorisé et aidé en premier lieu, car c’est lui qui est le plus proche de son patient. Nous avons eu un seul cas d’objection de conscience », assure la Dre Poitras.
À Québec, la région qui a reçu le plus grand nombre de demandes d’AMM au Québec (74 en 2016), après Lanaudière (63) et l’est de Montréal (61), le CHUQ prône aussi la formation personnalisée pour favoriser l’adhésion des médecins.
« Ceux qui ne travaillent pas en soins palliatifs envisagent cela avec beaucoup d’angoisses. C’est pourquoi j’accompagne beaucoup de médecins lors d’interventions », explique le Dr Alain Naud, médecin de famille au CHUQ.
Le CHUQ a même choisi récemment de déléguer aux archivistes de l’hôpital le soin de remplir « toute la paperasse administrative » liée aux demandes d’AMM. Le traitement de ces formulaires par les médecins pouvait nécessiter plusieurs heures de travail par semaine.
Au CISSS de la Montérégie-Est, une tout autre approche prévaut. Une dizaine de médecins administrent l’aide à mourir sur tout le territoire.
« Un guichet unique avec un seul numéro de téléphone a été créé pour répondre à toutes les demandes d’AMM. Un médecin peut évaluer la demande dans la journée », assure le Dr André Simard, directeur des services professionnels de l’établissement. « Comme on évalue rapidement, ajoute-t-il, le taux de décès en cours d’évaluation est très faible. »