Quelques mois avant la conférence sur le climat qui se tiendra à Paris en décembre 2015, les Etats ont commencé à rendre leurs « contributions » établissant leurs engagements de réduction de gaz à effet de serre. Un premier point d’étape avait été fixé au 31 mars pour ceux qui étaient « prêts à le faire ». Les autres le feront progressivement jusqu’à la prochaine date limite, fixée au 1er octobre. Au 9 avril, 34 pays (dont les 28 de l’Union européenne) ont rendu leur contribution.
Emissions de gaz à effet de serre : des périmètres différents
Difficile de comparer les engagements de réduction de GES entre eux car, avant une éventuelle uniformisation lors de la COP21, chaque Etat détermine la « date référence » à partir de laquelle il met en place ses mesures de réduction.
Ainsi, les 28 Etats de l’Union européenne se sont engagés à réduire de 40 % ses émissions de GES par rapport à 1990, soit la même date que celle évoquée dans le protocole de Kyoto, signé en 1997 et entré en vigueur en 2005. La Russie, la Norvège ou encore la Suisse ont choisi la même date référence.
Les Etats-Unis se sont engagés à une réduction de 50 %… mais par rapport au niveau de 2005. Cette année-là, le pays a connu un pic d’émissions à 5,8 milliards de tonnes d’équivalent CO2 émises (combustion de ressources fossiles inclue), contre 5,2 milliards en 2013 par exemple.
L’enjeu des forêts
La Russie a rendu une copie en apparence ambitieuse en s’engageant à réduire de 25 à 30 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 1990. Seulement, Moscou mise beaucoup sur ses forêts, qui représentent 25 % de la surface forestière mondiale. Qualifiées de « puits de carbone » car stockent le CO2, elles permettent de compenser des hausses d’émissions.
Le projet russe est finalement limité et présente « l’avantage » de ne pas avoir à changer en profondeur son modèle énergétique. Mais il pourrait être contrarié par les flammes : le World Resources Council (WRC) s’est inquiété début avril de la croissance des incendies de forêt dans le monde et notamment en Russie. Le pays a perdu 4,3 millions d’hectares par an en moyenne entre 2011 et 2013, ce qui constitue le quart des pertes forestières mondiales.
La Russie n’est pas seule à jouer ce jeu-là : l’Union européenne inclut également l’effet de stockage de CO2 par les forêts dans le calcul des émissions. En revanche, le Gabon, recouvert à 88 % par la forêt, ne l’a pas inclus dans le périmètre de réduction de ses émissions.
Le marché du carbone
La Suisse a elle aussi fixé un objectif ambitieux : une réduction de 50 % de ses émissions de GES par rapport à son niveau en 1990. Mais la Confédération helvétique, outre l’inclusion de la forêt dans le périmètre d’action, prévoit également d’avoir massivement recours au marché du carbone (à hauteur de 20 %), en achetant des crédits carbone et en participant à des projets de réduction d’émissions à l’étranger. Seuls les 30 % restants constitueront réellement une réduction des émissions nationales.
L’Union européenne, la Russie et les Etats-Unis, notamment, se sont engagés à ne pas inclure les marchés de compensation dans leur effort de réduction des émissions de gaz à effet de serre.Qu’est-ce que le marché carbone ?
Le marché carbone est un mécanisme financier qui permet à des entreprises « économisant » l’émission des tonnes d’équivalent CO2 de vendre ces tonnes sous forme de crédits. D’autres entreprises ne parvenant pas à réduire leurs émissions peuvent ainsi les racheter, ce qui leur octroie en quelque sorte des « droits à polluer ».
Par Alexandre Pouchard- Le Monde.fr