Un consortium d’entreprises menées par ERDF a lancé à Toulouse l’expérimentation auprès de 1.000 foyers toulousains d’un projet de réseau électrique intelligent «unique au monde», qui vise à optimiser l’utilisation d’électricité à l’heure des énergies renouvelables, selon ses initiateurs. Baptisé «Sogrid» (de «Sud-Ouest» et «grid» pour «réseau» en anglais), le projet consiste à disposer des appareils sur le réseau électrique afin d’envoyer des informations en temps réel sur ce qu’il s’y passe. Cette nouvelle «chaîne de communication numérique» doit permettre de piloter le réseau et d’adapter les flux d’électricité au cours de la journée. Avec ce système, ERDF compte mesurer directement les différents afflux de courants discontinu venant des panneaux solaires ou des éoliennes de particuliers, mais aussi repérer très rapidement les pannes et les pics de consommation au cours de la journée, ont détaillé les responsables du consortium lors d’une conférence de presse. «C’est une première mondiale», a assuré Gilles Capy, directeur inter-régional d’ERDF dans le Sud-Ouest. Il s’agit d’une «chaîne globale de communication entre le plus petit, c’est-à-dire chaque client», et «le plus gros», les usines, tout au long du réseau à basse tension et à moyenne tension, a-t-il ajouté. Lancé en 2013, le projet qui implique notamment les entreprises françaises Nexans et Capgemini, ainsi que des laboratoires universitaires, a permis de développer 5 nouveaux équipements qui ont vocation à être placés à différents endroits du réseau électrique. Ces objets doivent communiquer entre eux grâce à une puce électronique développée par le fabricant franco-italien de semi-conducteurs STMicroelectronics. Après une première phase de développement en laboratoire, ces technologies vont être testées dans 1.000 foyers toulousains, urbains et ruraux, pendant 12 mois. Actuellement, ERDF reçoit des données venant du réseau moyenne tension, mais ces informations passent par le réseau téléphonique. Le projet se base ici sur la technologie du Courant porteur en ligne (CPL). «Le CPL permet de transférer de l’information numérique, sur un réseau existant, où jusqu’à présent on transportait du courant, de l’énergie», a déclaré Philip Lolies, responsable Europe chez STMicroelectronics. In fine, cela doit ainsi permettre, par exemple, à un consommateur d’alimenter sa maison avec la batterie de sa voiture électrique lors des pics de consommation, ou encore d’adapter les injections d’énergie venant d’éoliennes de particuliers pour éviter les surcharges sur le réseau. «On est face à une rupture très importante», qui permet «à des clients de devenir eux-mêmes des producteurs», a dit M. Capy. «Comme on n’a pas trouvé un moyen fiable et économique de stocker l’électricité, il faut qu’on soit en permanence en auscultation, en temps réel», a-t-il ajouté. «Sogrid» dispose d’un budget de 27 millions d’euros, dont 12 millions financés par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). S’il fonctionne, il sera déployé progressivement sur le réseau français, en intégrant notamment les compteurs «Linky» qui vont être installés à travers la France à partir de la fin de l’année. L’Ecole d’économie de Toulouse (TSE) a conclu un partenariat pour exploiter les données récoltées et théoriser sur ces nouveaux mécanismes économiques. «Dans le bon vieux temps, il y avait le producteur, les consommateurs. On envoyait l’électricité, c’était relativement simple», a déclaré Jean Tirole, président de l’Ecole d’économie de Toulouse (TSE) et Prix nobel d’économie. «Maintenant, ça va dans les deux sens, donc il faut beaucoup plus d’intelligence, à la fois dans le réseau et chez les consommateurs», a-t-il poursuivi, évoquant notamment la tarification de l’énergie. AFP