Depuis la nuit des temps, l’homme prélève dans la nature des ressources pour ses besoins quotidiens. Dès le XVème siècle jusque dans les années 1950, l’industrialisation de la pêche a été progressive et marquée par l’impulsion de l’activité par les colonies européennes. L’avènement de la société de grande consommation a changé la donne ces 65 dernières années en évoluant considérablement vers une destruction massive de la nature et le gaspillage des ressources naturelles. Si l’industrialisation durant les trente glorieuses était synonyme de développement économique avec l’exploitation maximale des ressources naturelles, force est de constater qu’aucun écosystème n’a été épargné par l’accroissement des prélèvements sous une constante pression de compétitivité et de rentabilité. Hors cet essor économique a été réalisé sans connaissance réelle des ressources maritimes encourageant la fuite en avant dans des pratiques démesurées que condamne par ailleurs Ernst B. Frankel dans son guide de management environnemental des océans parus en 1995. Il insiste sur le fait que les ressources marines ont été exploitées de manière irrationnelle car on considérait qu’elles étaient inépuisables tout comme le mentionnait au XIXème siècle Thomas Henry Huxley: « La pêche au cabillaud, la pêche au hareng, la pêche à la sardine, la pêche au maquereau, et Probablement toutes les grandes pêcheries maritimes constituent des ressources inépuisables ; rien de ce que nous faisons n’affecte réellement la quantité de poissons » Les conséquences de plus de 67 ans de cette exploitation anarchique sont totalement catastrophiques et ne vont qu’en s’accélérant avec l’évolution démographique et l’activité humaine et industrielle inhérente. Le constat est aussi simple que gravissime, les récifs coralliens et autres habitats de poissons sont considérablement menacés de disparition. La chaine alimentaire est totalement déstabilisée avec l’extinction de certaines espèces que les prédateurs ne trouvent plus. La production des pêches est passée de 17 millions de tonnes par an à plus de 90 millions de tonnes depuis 1995. (voir graphiques de WorldBank et de la FAO)
Hors on constate que la courbe stagne depuis 20 ans et commence à décroître car les stocks sont en rupture et ne se régénèrent plus face à la demande. Bien que l’aquaculture est en pleine croissance contre les effets négatifs de la surpêche, il n’en demeure pas moins que 7% des espèces marines ont disparu depuis 1950, plus de la moitié des populations ont disparu, 85% des poissons commercialisés de la planète sont surexploitées à leur maximum. Les stocks des grands poissons qui présentent un intérêt commercial tel que le thon, la morue, l’espadon et le marlin ont diminué de 75% au cours du dernier siècle. Les ravages causés par cette surpêche entraînent un très grand nombre d’impacts sociaux, économiques, environnementaux irréversibles. On constatera des migrations de populations côtières incapables de survenir à leurs besoins sur la plupart des côtes du continent africain mais également américain et asiatique ayant lourds impacts financiers sur ces régions perdant leur principal secteur d’activités. L’aquaculture saurait-elle minimiser les impacts et constituer une solution durable à développer? Pas vraiment en fait, bien que des formes responsables d’aquaculture puissent contribuer à apporter significativement un approvisionnement en nourriture à certaines populations or les développements rapides et industriels intensifs démontrent également des limites alarmantes avec la dégradation de l’environnement et la destruction de milieux organiques originels de la pêche traditionnelle. De plus on constatera que l’aquaculture contribue à produire d’énormes quantités de déchets organiques et des eaux usées toxiques du fait des matières fécales non traitées et des produits pharmaceutiques utilisés afin de garantir une lutte efficace contre les épidémies en constante augmentation du fait de la très forte concentration des espèces produites au même endroit. Autre impact négatif la prolifération d’espèces d’algues nocives pour bien des espèces de fruits de mers mettant en danger directement les consommateurs et les prédateurs naturels. A titre d’exemple le golfe du Mexique historiquement très convoité par Cuba, le Mexique et les Etats-Unis a une eau excessivement polluée et saturée en azote avec peu de renouvellement de l’oxygène qui fait disparaître les espèces. Dans les eaux bordant la Louisiane c’est plus de 2 001 542 hectares d’espace maritimes qui sont impactés et communément appelés la Dead Zone en raison des graves problèmes hypoxiques rendant la vie impossible. L’aquaculture n’a pas non plus d’influence sur la pêche des espèces les plus prisées puisque les prélèvements restent toujours très importants. En méditerranée, le WWF a recensé 1.5 millions de tonnes de pêche par année et une disparition de 90% des stocks de thons, de maquereau et de bonite. Si l’homme ne réagit pas rapidement face à cette crise sans précédant il n’y aura plus de récifs coralliens d’ici 2050, une disparition de la quasi totalité des espèces, une aggravation économique continuelle et sans précédent pour tous les pays et régions vivants de la pêche. Les migrations de populations et les guerres inhérentes seront également en accroissement. S’il aura fallut une génération d’hommes pour détruire les ressources naturelles marines combien de générations faudra-t-il pour restaurer un écosystème marin durable pour sauver l’humanité de l’extinction progressive de toute biodiversité! Il est grand temps de changer de mode de vie et revenir à une consommation raisonnée si l’on veut pouvoir assurer la diversité et la sécurité alimentaire de nos générations futures. En attendant de réelles réponses, un éveil des consciences, des modes de consommation et une prise en compte plus sérieuse des instances internationales, le WWF a publié un conso-guide que l’on se doit inévitablement de suivre pour une consommation responsable des produits de la mer.