Deux cyclo-bus, avec assistance électrique, circulent chaque matin dans les rues de Rouen, avec à bord une dizaine d’enfants pédalant de bon cœur en direction de l’école: un mode de transport propre, sportif, que parents et élèves semblent plébisciter. «C’est elle qui demande à prendre ce bus, elle adore, et moi je gagne 45 minutes chaque matin avant d’aller à mon travail», explique Hélène, une mère d’élève qui fait monter sa petite Lou, 7 ans sur cet étrange véhicule à multiples pédales. Destination: l’école Sainte-Marie, une école primaire privée en plein centre de Rouen. Chaque enfant a déposé son cartable dans un coffre à l’avant, s’est coiffé d’un casque de cycliste et a endossé un gilet jaune fluo. Aux commandes, Vincent Guezou, 23 ans, s’assure que tout le petit équipage est bien en place. Et il démarre en douceur. Son engin, baptisé «S’cool bus» circulant sur quatre roues, ressemble un peu aux Rosalies mis à la disposition des vacanciers dans les stations balnéaires. Mais il est beaucoup plus sûr car équipé d’un système empêchant qu’il ne se renverse. Il a d’ailleurs été homologué par le ministère de l’Écologie et des Transports. Large de seulement 1,20 m il peut passer presque partout: un atout dans une ville historique où les rues sont parfois étroites et pavées. Le quadricycle, qui circule à 15 km/h, emprunte en priorité pistes cyclables et rues piétonnes. «Pour nous la sécurité c’est l’impératif numéro un», dit-il. «Les enfants prennent conscience des risques de la circulation et du bon comportement à adopter. Même si des piétons veulent parfois nous laisser passer, nous nous arrêtons car ils sont prioritaires», explique-t-il. Le «s’cool bus» provient des Pays-Bas. Il est construit par une très petite entreprise de mécanique d’Aalten, près de la frontière allemande, à une cinquantaine de kilomètres de Nimègue par Thomas Tolkamp, un passionné de cycles, qui a conçu ce quadricycle comme un véhicule familial, sans assistance électrique. Amaury Piquiot, 23 ans, un étudiant rouennais en école de commerce, avait remarqué l’engin alors qu’il était en stage dans une entreprise de la région. Trois mois plus tard, de retour à Rouen, son professeur de logistique lui commandait de monter un dossier sur un transport écologique à créer. «J’ai tout de suite repensé au véhicule que j’avais vu aux Pays-Bas et j’ai envisagé son utilisation pour le ramassage scolaire», explique-t-il. Après les travaux pratiques scolaires, Amaury va poursuivre son projet avec Vincent. Les deux amis vont aller voir le mécanicien néerlandais et se former à la maintenance de ce type d’engin qu’ils vont équiper de batteries pour l’assistance électrique. Ils vont créer une association, lever plus de 12.000 euros via le fonds participatif européen Ulule puis se lancer dans l’aventure. Privilégiant le bouche à oreille, plutôt que des aides publiques, les deux compères se disent aidés de diverses façons par un réseau de 150 personnes . Leur projet séduit. Écologique, sportif – les enfants doivent fournir un certificat médical pour emprunter le bus -, convivial, éducatif, il favorise aussi la mixité sociale. Mais il est encore embryonnaire: deux écoles primaires desservies, l’une publique, l’autre privée, celle qu’Amaury a fréquentée dans son enfance. Soit une vingtaine d’enfants transportés. Pour être écologiquement utile et faire diminuer les files de voitures à l’entrée des écoles, le petit bus va donc devoir passer la sur-multipliée. Comment envisager la croissance ? «Il faudra une usine pour construire ces bus, en Normandie ou ailleurs», affirme le créateur du concept. «Ça me plait énormément mais il faut commencer à en discuter tous ensemble», fait remarquer Céline Millet, adjointe à la mobilité durable de Rouen. Il faudra bien aussi sortir du bénévolat et entrer dans le monde économique. «Heureusement qu’on a nos parents derrière nous», reconnaît Amaury. AFP