Dans un Venezuela en pénurie des produits les plus basiques, voir arriver tous les 21 jours un sac du gouvernement contenant du riz, du lait et des haricots devrait être une bonne nouvelle. Mais dans ce pays sous tension, la polémique n’a pas tardé.

Pas assez garnis, distribués au compte-gouttes et en fonction des préférences politiques: une pluie de critiques s’est abattue sur ces sacs, distribués depuis avril via des comités de citoyens appelés Clap (Comités de fourniture et de production).

L’idée du président socialiste Nicolas Maduro était de contourner la contrebande, responsable selon lui des rayons quasi vides des supermarchés.

Selon une enquête de l’institut Datanalisis, plus de 80% des produits de première nécessité (farine, huile, sucre…) sont introuvables au Venezuela, pays pétrolier à l’économie dévastée par la chute des cours.

Dans le quartier de 23 de Enero à Caracas, où est enterré l’ex-président Hugo Chavez (1999-2013), une poignée d’habitants font la queue pour récupérer ces sacs remplis d’aliments subventionnés comme le riz, le sucre ou les haricots blancs.

Les Clap sont chargés de les remettre à prix réduits aux bénéficiaires de programmes sociaux.

« Ils sont le grand instrument de la révolution pour vaincre la guerre économique », c’est pourquoi «tout le pouvoir doit aller aux Clap », a assuré Nicolas Maduro, qui accuse les chefs d’entreprise de créer artificiellement la pénurie pour le déstabiliser.

Chaque jour, les Vénézuéliens font la queue pendant des heures face aux supermarchés et pharmacies, sans avoir l’assurance de trouver les produits qu’ils recherchent. Ils souffrent de la pire inflation au monde (180% en 2015).

Chargée de vérifier sur une liste la distribution pour 254 familles, Herminia Rangel, responsable d’une unité locale du gouvernement, explique à l’AFP que deux types de sacs sont remis: une version basique appelée « Mercal », contenant « des produits fabriqués par le gouvernement » ; l’autre, « prépayée », pour laquelle les habitants versent une somme à l’avance.

Pour un sac Mercal, payable sur place, il en coûte ce jour-là 910 bolivars (1,7 dollar au taux de change officiel le plus élevé), bien moins que les 3.700 bolivars du sac prépayé.

« Même si le sac n’apporte pas tout, cela allège beaucoup mon budget car je n’ai pas à acheter auprès des +bachaqueros+ », ceux qui revendent au marché noir et au prix fort les produits introuvables ailleurs, raconte Mayerlin Monascal, mère de trois enfants.

Aux tarifs appliqués par ces revendeurs, un sac « Mercal » coûterait presque 14 fois plus: 12.500 bolivars.

Mais beaucoup d’habitants se plaignent que ces sacs contiennent peu et parviennent à une infime partie de la population.

« Cela aide mais cela ne suffit pas pour tout ce dont on a besoin (…). Moi je vais avoir besoin de couches, et le lait pour bébé est vendu à 7.000 bolivars par les +bachaqueros+ », se lamente Yosmary Ramos, 19 ans, enceinte de sept mois et vivant dans le quartier de Petare.

Ces dernières semaines, plusieurs émeutes devant des supermarchés ont été provoquées, selon les témoins, par l’intervention de militaires ayant confisqué des camions d’aliments dès leur arrivée pour les affecter aux Clap, suscitant la colère des habitants.

Dans le quartier de 23 de Enero, la distribution de sacs est désormais encadrée par les forces de l’ordre.

Une rumeur a couru selon laquelle seuls les Clap auraient désormais accès aux aliments basiques, aux tarifs subventionnés.

Le ministre de l’Alimentation Marco Torres l’a nié, mais il a reconnu que ces comités avaient la priorité.

Mécontents, les commerçants ont prévenu que ce système de distribution allait aggraver la « pénurie » et la « corruption », en étant sujet « au bon vouloir des fonctionnaires ».

L’opposition de centre-droit, qui veut organiser un référendum pour révoquer le président Maduro, désapprouve elle aussi.

« Il est inacceptable que le peu de nourriture qu’il y a, le gouvernement la distribue à travers son parti. On ne peut pas accepter que la nourriture ait une couleur politique », s’est indigné Henrique Capriles, un des chefs de l’opposition.

Le gouvernement, lui, nie toute préférence politique dans le choix des bénéficiaires: « J’ai été dans les maisons de familles qui ne croient pas à la révolution et on leur remet des sacs », assure Griselda Olivares, coordinatrice du gouvernement pour la distribution d’aliments à Caracas.

 

AFP

 

Publisher: Lebanese Company for Information & Studies
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