A 6 ans, Hope est totalement défigurée. Les yeux bandés et les oreilles bouchées avec des rouleaux de coton, elle respire fort pendant l’opération en plein air où des vétérinaires nettoient l’effarante cavité laissée par des braconniers qui lui ont arraché, à la machette, ses cornes de rhinocéros.

Hope est une miraculée. Un an après avoir été attaquée et laissée pour morte dans une réserve près de Port Elizabeth, dans le sud de l’Afrique du Sud, cette battante est toujours vivante malgré sa plaie encore béante.

Johan Marais, tout de kaki vêtu, prend un mètre de menuisier pour la mesurer. A l’origine, cette plaie faisait 1 mètre sur 50 cm. « Depuis, elle s’est résorbée de 60% », constate, satisfait, le vétérinaire chirurgien. Elle n’en reste pas moins encore très impressionnante.

Le pachyderme a déjà subi une quinzaine d’interventions pour tenter de reconstruire sa face, où il ne reste qu’un trou géant à la place des cornes.

Johan et ses acolytes de l’organisation Saving the Survivors (Sauver les survivants) font office de pionniers. « On ne sait pas quels antibiotiques utiliser ni quelle dose, on ne sait pas quels calmants administrer, on ne connaît même pas les principes de base de l’anatomie du rhinocéros. C’est un gros problème quand on perd 1.200 rhinocéros par an » en Afrique du Sud, s’indigne Johan Marais, avec sa voix de basse.

Les rhinocéros, dont 80% de la population mondiale vit en Afrique du Sud, sont massacrés pour leurs cornes qui se vendent à prix d’or, jusqu’à 60.000 dollars le kilo sous forme de poudre. La demande a explosé en Asie, où on leur attribue des vertus thérapeutiques, non prouvées scientifiquement.

Depuis un an, Johan Marais multiplie les techniques et recourt à des matériaux parfois improbables, pour protéger et tenter de reboucher la cavité de Hope: peau d’éléphant, fil de nylon très robuste utilisé pour pêcher du marlin, fils de fer…

Mais « la plaie démange Hope et elle est tellement puissante – elle fait 2 tonnes – qu’à chaque fois elle arrache tout » en se grattant à l’enclos où elle est désormais confinée, raconte le vétérinaire Gerhard Steenkamp, gants bleus de chirurgien et pantalon maculé de sang.

Dernière tentative en date: le recours à des lacets extensibles, utilisés pour rétracter l’abdomen humain.

L’intervention chirurgicale qui dure deux heures est délicate. Hope est anesthésiée, titube, résiste, avant d’être mise à terre, avec l’aide d’une demi-douzaine de personnes.

Johan nettoie la plaie, tout en chassant les mouches attirées par l’odeur fétide. En deux semaines, grâce aux « lacets », le trou a diminué d’un demi-centimètre. « C’est toujours bon à prendre », lance le vétérinaire, décidant de reconduire l’opération une seconde fois.

Il coud d’abord une bande de collagène sur la partie la plus étroite de la plaie, pour aider la peau à repousser. Puis se saisit d’une perceuse et perfore la peau épaisse du mammifère pour y accrocher, de chaque côté de la blessure, des « lacets ».

Hope s’agite, ses oreilles bougent, il faut faire vite avant qu’elle ne se réveille. Une moustiquaire est agrafée sur sa tête, le tout recouvert d’un large bandage fixé avec du sparadrap bleu. Opération terminée. En quelques secondes, Hope se relève et les vétérinaires quittent l’enclos en courant.

Depuis un an, Saving the Survivors a dépensé 40.000 euros pour tenter de sauver Hope. « Le temps, l’argent et les efforts déployés valent le coup », affirme l’anesthésiste Jana Pretorius, balayant les critiques. « Si nous avions 100.000 rhinocéros encore en vie, on ne ferait probablement pas cela, mais leur nombre devient critique (environ 25.000 dans le monde). Cela a un sens de les sauver » et d’apprendre comment les sauver.

Le chirurgien Steenkam renchérit: « On ne soigne pas Hope pour reboucher son trou, on la soigne car elle fait partie intégrante de la préservation des rhinocéros ». « On parlera de succès le jour où Hope donnera naissance à un bébé, ce jour où elle fera partie de la renaissance des rhinocéros », dit-il.

Johan et son équipe sont confiants. La vie reprend déjà ses droits. Contre toute attente, une corne est en train de repousser sur la gueule cassée de Hope.

 

AFP

 

Publisher: Lebanese Company for Information & Studies
Editeur : Société Libanaise d'Information et d’Etudes
Rédacteur en chef : Hassan Moukalled


Consultants :
LIBAN : Dr. Zaynab Moukalled Noureddine, Dr Naji Kodeih
SYRIE : Joseph el Helou, Asaad el kheir, Mazen el Makdesi
EGYPTE : Ahmad Al Droubi
Directeur Éditorial : Bassam Al-Kantar

Directeur Administratif : Rayan Moukalled

Addresse: Liban, Beyrouth, Badaro, Sami El Solh | Immeuble Al Snoubra, B.P. 113/6517 | Téléfax : +961-01392444 - 01392555-01381664 |email: [email protected]

Pin It on Pinterest

Share This