La Tanzanie pourrait devenir un nouvel acteur du marché de l’hélium, après la découverte d’un énorme gisement naturel de ce gaz noble qui ne sert pas qu’à gonfler des ballons et des bouteilles de plongée, mais a de nombreuses applications industrielles.
A quoi sert l’hélium?
Gaz plus léger que l’air, incolore, inodore, l’hélium est aussi, à l’état liquide, le gaz le plus froid de la terre (-269°C), pratiquement au niveau du zéro absolu.
« L’hélium est principalement utilisé dans l’industrie pour ses capacités de refroidissement », explique à l’AFP Eric Prades, directeur monde de l’activité hélium et gaz rares du groupe français Air Liquide.
C’est un élément essentiel des scanners médicaux (imagerie à résonance magnétique, IRM), dont il sert à refroidir les puissants aimants.
En 2015, environ 57 millions de m3 d’hélium étaient utilisés dans le domaine médical, une demande qui devrait connaître un taux de croissance annuel moyen de 7% d’ici 2020, selon un rapport du cabinet d’études Technavio publié en début d’année.
Toutefois, si d’un côté « les hôpitaux du monde entier, notamment des pays émergents, s’équipent de plus en plus d’unités IRM, cet effet est neutralisé par l’arrivée de nouveaux scanners de plus en plus efficaces, où l’hélium est bien conservé », selon M. Prades.
L’autre grand marché de l’hélium est l’électronique, où il est utilisé pour créer des atmosphères propres dans le processus de fabrication, ainsi que pour le refroidissement dans la production de fibre optique.
Il sert par ailleurs dans le domaine spatial, pour refroidir les lanceurs de satellites, et dans l’automobile pour la production d’airbags.
Comment et où est-il produit?
La principale usine d’hélium est… le Soleil, d’où il tire son nom, du dieu grec Hélios. « Mais c’est un peu loin pour l’exploiter », plaisante M. Prades.
L’hélium ne peut pas être produit artificiellement à l’heure actuelle. Cependant il est contenu dans les gisements de gaz naturel, d’où il est extrait par processus cryogénique. Aujourd’hui « 80 à 90% » de la production mondiale d’hélium provient de cette technique, selon M. Prades.
Les Etats-Unis produisent aujourd’hui environ 60% de l’hélium mondial. Ayant saisi très tôt le haut intérêt stratégique de ce gaz, le pays possède une immense réserve fédérale d’hélium près d’Amarillo (Texas), correspondant actuellement à 25-30% de la demande mondiale, selon Technavio.
Le Qatar est le deuxième plus grand producteur d’hélium, assurant environ un quart de la production mondiale, tandis que l’Algérie, la Russie et l’Australie se partagent environ 10% du marché.
Quant aux fournisseurs mondiaux d’hélium, le trio de tête est constitué par l’Allemand Linde, le Français Air Liquide et l’Américain Praxair.
La Tanzanie va-t-elle changer la donne?
L’entreprise minière norvégienne Helium One a annoncé mardi avoir découvert en Tanzanie un gisement naturel d’hélium estimé à 1,5 milliard de mètres cubes, soit l’équivalent de la demande mondiale pendant sept ans.
Ce gisement naturel « a un potentiel intéressant » car il a l’avantage d’éviter des coûts d’extraction du gaz naturel, estime M. Prades. « Mais cette source va s’inscrire dans un paysage compétitif », précise-t-il.
Car le russe Gazprom pourrait représenter 40% du marché mondial dans les années 2020, grâce à un méga-projet d’extraction à partir de gaz naturel en Sibérie orientale.
En outre, l’Iran, « qui a accès à la même couche de gaz naturel que le Qatar », pourrait lui aussi se mettre à fabriquer de l’hélium, glisse l’expert d’Air Liquide.
Y a-t-il une pénurie d’hélium?
En 2012-2013 les prix avaient flambé, en raison de difficultés de la réserve fédérale d’hélium américaine, dont l’avenir était compromis.
A l’époque, la crainte d’une pénurie était telle que le parc Disneyland de Tokyo avait banni les ballons gonflables.
Cependant, aujourd’hui, « il n’y a plus de problèmes d’approvisionnement » et « on est actuellement dans une tendance plate des prix, voire décroissante », tournant actuellement autour de 3,8 dollars le mètre cube, selon M. Prades.
La demande mondiale d’hélium devrait quant à elle croître modérément, de 2 à 3% par an dans les cinq prochaines années, selon lui.
Source : AFP – Etienne BALMER