Poids, tension, diagnostic, le fabricant français d’objets médicaux accélère sa mue dans les services d’e-santé, source de revenus bien plus sûre.
La santé connectée, domaine réservé des géants de la tech ou de l’industrie ? » Les grands groupes ont plutôt envie de travailler avec nous « , rétorque Eric Sebban, le fondateur de Visiomed. L’aventure a commencé avec un thermomètre. Ancien expert en électronique militaire, Eric Sebban crée son entreprise en 2007 pour commercialiser le premier thermomètre sans contact à infrarouge. Ce Thermoflash fait la conquête de l’international au moment des pandémies.
Toute une gamme d’objets
L’aventure continue. « En 2009, je tombe sur un article sur la télémédecine et j’en tire l’idée de lancer toute une gamme d’objets connectés », raconte l’entrepreneur. Entre 2013 et 2015, il développe donc une série de petit matériel médical, vendu en pharmacie : tensiomètre, oxymètre de pouls, lecteur de glycémie, électrocardiogramme. Des objets sûrs, agréés par les autorités de santé européenne et la FDA américaine. Et tous capables de communiquer avec patients et médecins.
Puis vient le virage des services avec une application, BeWell-Connect. « Visiomed a compris que la vente de matériel vous fait exister en tant qu’industriel, tandis que les services vous assurent des revenus récurrents », analyse Guillaume Marchand, fondateur de l’agence de notation d’applications médicales DMD Santé et président de l’association France eHealth.
Services, du gratuit au payant
Gratuit, BeWellConnect permet aux particuliers de suivre leur état de santé sur leur portable grâce aux indicateurs envoyés par un ou plusieurs instruments Visiomed : poids, tension, fréquence cardiaque. Deux ans plus tard, la jeune entreprise passe une autre étape en lançant un premier service payant : Check-Up. Pour 4,90 euros par mois, les abonnés bénéficient d’un prédiagnostic. « Un service qui évite de s’inquiéter pour rien et d’aller aux urgences à 1 heure du matin », explique François Teboul, le directeur médical de Visiomed. Check-Up intègre l’expertise d’une acquisition réalisée par Visiomed : Medical Intelligence Service, société française dont l’algorithme peut poser 250 diagnostics d’urgence.
Troisième niveau d’offre, My Doc, lancé début 2016, met les utilisateurs en contact avec une plateforme de médecins urgentistes 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, pour une vingtaine d’euros par mois. Une solution pour les expatriés dans des pays pauvres en infrastructures médicales ou pour les ruraux vivant dans des déserts médicaux.
Pour se faire connaître, Visiomed a lancé une première campagne de publicité à l’automne. Mais elle compte se vendre grâce aux assureurs et aux mutuelles. Une première compagnie, Eovie, a ainsi offert à tous ses adhérents l’accès aux services Check-Up et My Doc.
Cap sur les CHU
Parallèlement, Visiomed attaque le marché des professionnels de la santé : hôpitaux, pharmacies, maisons de retraite. En réponse à un appel d’offres, Visiomed équipe ainsi le CHU de Nantes, pour un programme pilote de suivi à domicile de patients ayant reçu une greffe du rein. « L’objectif est de diviser par deux les réhospitalisations », expose Eric Sebban. Un domaine où la société doit compter avec un puissant rival, la société californienne iHealth. Face à lui, Visiomed joue sur la protection des données puisque celles-ci restent à l’hôpital ou chez un hébergeur agréé.
Pour anticiper les besoins de ses patients connectés, de nouveaux matériels sont développés. Le dernier bébé, VisioCheck, est une station de télémédecine miniature intégrant cinq instruments et une caméra. « L’outil idéal pour l’espace confidentialité d’une pharmacie », argue François Teboul. Et, en partenariat avec le chinois Huawei, sera bientôt commercialisé un boîtier pour surveiller la santé des gens âgés à domicile, connectable à leur télévision. Deux innovations présentées au CES de Las Vegas. Trop gourmande la petite entreprise ? Elle dispose de ressources financières abondantes, avec 100 millions levés au total. Et Eric Sebban, l’inventeur, a eu la sagesse de faire équipe avec un médecin, l’urgentiste François Teboul.
