Films, dessins animés, parcs d’attractions, chaînes de télévision, produits dérivés… L’estampille de la compagnie rapporte des milliards de dollars.
Walt Disney l’a encore emporté. La Belle et la Bête, adaptation filmée du célèbre dessin animé sortie le 23 février, a rapporté 175 millions de dollars aux Etats-Unis et au Canada pour ses trois premiers jours. Depuis, le film a passé la barre du demi-milliard de recettes. Le scénario de 1991 n’a pas bougé et tous les ingrédients d’un Disney sont présents : une jolie princesse modernisée – l’actrice Emma Watson -, un immense château, de la magie et des chansons toutes les quinze minutes.
Le nom du Studio Disney, créé en 1923, s’est imposé comme un label de qualité dans le divertissement. Les parents savent qu’ils y trouveront toujours une dose de rêve et le minimum de violence pour leurs chérubins quitte à devoir passer une heure et demi dans un univers trop aseptisé.
La qualité des programmes n’en pâtit pas pour autant : de Zootopie à la Reine des neiges, en passant par Vice-Versa et Rebelle, tous ont décroché l’oscar du meilleur film d’animation ces dernières années. Venant couronner le tout, le succès économique est au rendez-vous : le studio Disney Animation a passé la barre des 7 milliards de dollars de recettes annuelles. Un record !
L’empire Disney est loin de se limiter à cette façade colorée. Au total, il pèse 183 milliards de dollars à Wall Street et a réalisé 55 milliards de chiffre d’affaires en 2016. « Nous sommes producteurs de contenus d’abord, ensuite, nous essayons de les distribuer sur toutes les plateformes possibles », explique Jean-François Camilleri, patron de Disney France.
Une diversification porteuse
C’est la deuxième force de la Walt Disney Company, la diversification qui va des produits dérivés aux chaînes de télévision en passant par les parcs à thèmes, voire les croisières. « La différence entre la Warner et Disney, c’est que le premier fait des films, le deuxième des marques. Dans le monde numérique, c’est un gros avantage car il peut les faire exister après la séance de cinéma », explique un connaisseur du secteur. Les produits dérivés représentent 5,5 milliards de dollars de revenus par an. Sur les étagères des magasins de jouets, on trouve de tout, des livres aux Tshirts, en passant par les figurines à l’effigie des héros ou les jeux vidéo. « Les jouets sont des licences partagées avec les leaders mondiaux Mattel et Lego, la plupart sont des relations de très longue date », précise Jean-François Camilleri. « Leur atout est de se baser sur des personnages très forts et les déployer sur des jouets pour tous les âges, les goûts, les prix. La stratégie commerciale est bien ficelée : les jouets participent à la promotion des films et inversement », explique Franck Mathais, directeur des ventes de la Grande Récré. Dans ses magasins, les produits Disney sont incontournables : les jouets sous licence font un quart des ventes en France et, dans leur majorité, découlent de marques Disney.
A cela s’ajoutent les dix parcs d’attractions dans le monde, à la fois de belles vitrines et une manne de revenus puisque ceux gérés par des sociétés extérieures versent 5 % de royalties à la maison mère. C’est le cas d’Euro Disney, dont la société est très lourdement endettée (lire encadré). Le dernier parc à thème, ouvert en juin 2016, vise l’immense marché chinois. Il a vu le jour à Shanghai après quinze ans de travaux et 5,5 milliards de dollars d’investissement.
La stratégie du groupe a cependant connu ses moments d’hésitations. En 2004, les difficultés s’accumulent. Un concurrent, les studios Dreamworks fondés par des ex-Disney et Steven Spielberg, propose des dessins animés différents, adaptés à un public transgénérationnel et des images modernisées sur ordinateurs. En tête Shrek, l’ogre vert, renvoie les princes en collants moulant au placard. L’autre concurrent, Pixar, mise sur Le Monde de Nemo l’année où Disney parie sur le trop sage Frère des Ours. Disney a alors l’air d’une proie facile et le groupe de divertissement Comcast (Jurassic Park, Fast and Furious) lance une OPA hostile contre lui. Inquiets et réactifs, les actionnaires font sauter le patron Michael Eisner et le remplacent par Bob Iger, qui a été reconduit jusqu’en 2018.
Trois rachats pertinents
C’est ce même Bob Iger qui va alors racheter des concurrents innovants ou imaginatifs pour donner à Disney le coup de fouet qui lui manquait. D’abord Pixar à Steve Jobs en 2006 pour 7,4 milliards de dollars, puis la machine à superhéros Marvel (XMen, Iron Man) en 2009 pour 4 milliards, et enfin la société de production de Georges Lucas, à l’origine des Star Wars, pour une somme équivalente en 2012. Trois bons calculs.
Il reste une faiblesse à laquelle Bob Iger doit maintenant s’attaquer : redresser l’activité télévision de Disney, qui génère la plus grosse partie de ses revenus, soit 23,7 milliards de dollars en 2016. Cette quinzaine de chaînes, diffusées en quasi-totalité aux Etats-Unis, comprend les programmes familiaux d’ABC, la sportive ESPN et les Disney channels. Toutes sont concurrencées par les programmes en ligne et en streaming. Le prochain coup de fouet sera celui du numérique.
Euro Disney en proie à des difficultés
A Marne-la-Vallée, Disneyland Paris a fêté ses 25 ans, fier de ses 320 millions de visites. « Nous avons investi massivement dans une nouvelle parade, rénové l’attraction Star Tour et nous allons rouvrir un Space mountain inspiré de Star Wars », s’emballe Julien Kauffmann, vice-président d’Euro Disney. Pourtant cette filiale de la Walt Disney Company va mal. En 2016, le parc a enregistré une baisse de 10 % du nombre de visiteurs et une perte record de 705 millions d’euros avec une dette qui dépasse le milliard. Julien Kauffmann l’attribue en grande partie aux attentats : « Nous avons perdu la clientèle la plus contributive, celle qui vient d’Espagne, d’Italie ou du Moyen-Orient pour trois ou quatre nuitées ». La maison mère a lancé une OPA ce 26 avril : elle veut investir 1,5 milliard d’euros et annuler la redevance 2017. Mais, à 2 euros par action, le prix d’achat est bien loin des 11 euros de l’entrée en Bourse, fin 1989.