Paris Healthcare Week, le grand rendez-vous annuel des hôpitaux s’est tenu cette semaine à Paris. L’occasion de rappeler les défis que devront relever les établissements français.
Pas moins de 30.000 visiteurs ont afflué cette semaine au grand-rendez-vous annuel des hôpitaux, Paris Healthcare Week. Un monde hospitalier confronté à de vastes bouleversements. Tour d’horizon des défis qui attendent l’hôpital.
1. Améliorer la sécurité
Maladies nosocomiales, erreurs de manipulation, accidents opératoires… Des événements dramatiques qui entraînent des morts (4.000 chaque année pour les maladies nosocomiales) et représentent plus d’un milliard de frais de litiges. Les hôpitaux doivent traquer la « non qualité » en se dotant d’indicateurs et de procédures rigoureuses, comme le font déjà depuis des décennies les industries de pointe comme l’aéronautique ou l’automobile. La Haute autorité de santé s’y est attaquée en délivrant des certifications aux établissements français et en veillant à diffuser une « culture de la sécurité ».
2. Faire face au vieillissement
Les hôpitaux doivent s’adapter à l’accueil de patients de plus en plus âgés. Un défi qui sera relevé par de multiples solutions: attention à la nutrition, télésurveillance, travail en équipes… Récompensé par un prix, le CHU de Limoges a par exemple mis en place un service d’urgences spécifiquement dédié aux personnes âgées.
3. Respecter les contraintes budgétaires
Explosion des maladies chroniques, inflation du prix de certains traitements: autant de facteurs qui vont dans le sens d’un alourdissement de la facture, au moment où les Etats ont des finances contraintes. Faire plus avec moins? L’équation posée aux hôpitaux tient de la quadrature du cercle. L’innovation, l’e-santé peuvent dégager des économies. Mais une vision strictement comptable de l’hôpital est-elle la bonne approche? Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France, qui fédère la plupart des grands établissements publics, plaide pour un autre regard. « La santé est un atout pour notre pays, une source de croissance, un gisement potentiel d’emplois à haute valeur ajoutée, qui plus est non délocalisables. »
4. Déployer l’e-santé
Dossier médical partagé, capteurs intelligents, objets connectés… Le déploiement de l’e-santé va révolutionner la vie des malades comme des soignants, en permettant aux patients de revenir plus tôt chez eux, de bénéficier de diagnostics plus sûrs, de médicaments dosés sur mesure, etc.
Certains hôpitaux français se lancent. Par exemple la télésurveillance des patients souffrant d’insuffisance cardiaque chronique, d’insuffisance respiratoire chronique et d’insuffisance rénale chronique est testée dans plusieurs régions. Depuis décembre, ces nouveaux actes médicaux sont reconnus et remboursés. Autre petit choc culturel, les hôpitaux de l’AP-HP ont adopté la prise de rendez-vous par internet, assurée par Doctolib. Reste à accélérer…
5. Adopter les traitements innovants
Thérapeutique bien sûr, l’innovation passe par l’accès aux traitements de pointe, notamment dans le domaine du cancer. Sur ce chapitre, la France peut et doit mieux faire: freinés par une réglementation très lourde, les grands laboratoires pharmaceutiques ont progressivement déserté les hôpitaux français pour tester en phase précoce leurs médicaments les plus innovants. Une perte de chances pour la médecine et les patients français.
6. Réorganiser les soins
On associe l’innovation à la découverte de molécules, mais elle touche aussi l’organisation des hôpitaux. Le boîtier développé par la start-up Happytrack permet par exemple de localiser un appareil égaré dans les dédales de l’hôpital comme un échographe ou un brancard. Un objet connecté qui pourrait faire gagner 30 à 60 minutes par jour à un infirmier -une économie potentielle d’1,8 milliard d’euros pour l’ensemble des hôpitaux. L’innovation peut aussi consister à changer les façons de travailler. Venu du Danemark, un protocole chirurgical baptisé Eras (Enhanced recovery after surgery) est actuellement testé à Strasbourg. Il permet aux malades de sortir 48 heures après une chirurgie lourde et surtout de réduire les complications post-opératoires. A condition de bousculer des dogmes bien établis, comme l’idée qu’un malade doit arriver à jeun avant une anesthésie.
7. Alléger l’administratif
L’ennemi le plus redoutable des hôpitaux n’est pas visible au microscope: la paperasserie, excessivement lourde, freine l’innovation, pèse sur les comptes et empoisonne la vie du personnel. D’où le souhait émis avec force par Frédéric Valletoux. Dans la conférence inaugurale de Paris Healthcare Week, le président de la Fédération hospitalière de France (FHF) a appelé à des « mesures de simplifications législatives, tant l’empilement des normes, lois et autres réglementations devient aujourd’hui une source d’épuisement pour nos établissements mais également une source de coût non négligeable ».
Nommée mercredi, la nouvelle Ministre des solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, saura-t-elle répondre à ces vastes défis?