Changement climatiqueLes participants ont planché hier sur une nouvelle version du texte de l’accord global en gestation, révisé par le Comité de Paris et distribué par la présidence française.
Le financement (comment assurer le budget en vue des efforts auxquels s’engageront les pays après 2020), la différenciation (garder le clivage entre pays développés et en développement, ou le modifier) et le degré d’ambition (faire en sorte que l’augmentation de la température de la terre reste en deçà de deux degrés, ou de 1,5) : tels sont les trois grands axes qui restaient hier non résolus dans le dernier texte d’accord auquel sont parvenus les négociateurs à la COP21, à Paris. Le texte, révisé par le Comité de Paris (mis en place par la présidence française à cette fin), à la lumière des négociations qui ont eu lieu les deux premiers jours de la seconde semaine du sommet, était attendu pour 13 heures : il a été distribué aux parties quelque deux heures plus tard. Les parties avaient quelques heures pour discuter des points en suspens avant que le Comité de Paris ne planche une nouvelle fois sur le texte à partir de la soirée (et probablement tard dans la nuit), pour élaborer un document qui sera présenté aujourd’hui, jeudi. Dans une déclaration en salle plénière, le président de la COP Laurent Fabius a expliqué que le texte est tombé de 43 à 29 pages, que les trois quarts des options mises entre parenthèses (pour ouvrir la voie au débat sur les points qui pourraient être litigieux) ont été réduites. Il a souligné que ce texte « propre » constitue une avancée par rapport au texte remis samedi (par les négociateurs, avant l’arrivée des ministres), mais qu’il n’est pas une version finale de l’accord. Ce qui n’en signifie pas moins, selon lui, qu’il y a encore beaucoup de travail à faire, car « rien n’est agréé tant que tout n’est pas agréé ». M. Fabius a noté des compromis autour du renforcement des capacités des pays, des efforts sur l’adaptation (aux changements climatiques), des points de vue rapprochés autour des « pertes et dommages » (en d’autres termes des compensations en cas de dommages survenus suite à des crises climatiques), des progrès sur des sujets tels que le transfert de technologies, les forêts… Il n’en demeure pas moins que les trois questions qui restent en suspens sont essentielles : la différenciation, le financement et le niveau d’ambition de la COP. Celle du financement, notamment, a constitué traditionnellement un élément de blocage dans ces négociations, entre des pays développés, qui ne veulent plus être les seuls à mettre la main à la poche, et les pays émergents, qui renvoient les premiers à leur responsabilité historique (voir L’Orient-Le Jour du 9 décembre). Les ONG qui font partie de la grande coalition « Climate Action Network » (CAN) ont tenu une conférence de presse informelle juste après la distribution du texte. Elles ont demandé aux ministres « un effort final pour un accord climatique fort, par le choix des options les plus ambitieuses possibles ». Durant cet échange avec la presse, les experts des ONG ont insisté sur l’importance de citer clairement, dans le texte, l’objectif de 1,5 degré de hausse maximale de la température de la terre, concept auquel tiennent les pays les plus vulnérables que même une hausse de deux degrés mettrait en danger (les engagements volontaires de réduction des émissions de gaz à effet de serre, faits par plus de 180 pays, nous gardent dans une trajectoire d’environ trois degrés). Ils ont aussi souligné l’importance de définir les moyens d’y arriver. Ils ont noté quelques progrès au niveau de la différenciation, soulignant que les points de vue semblent se rapprocher. Mais en gros, selon eux, il y a encore beaucoup trop d’options en suspens, à un stade très avancé des négociations : les choix de l’une ou de l’autre pourraient déterminer si l’accord sera plus ou moins faible ou fort. Kaisa Kosonen, de Greenpeace, a mis l’accent sur les engagements volontaires des pays, « toujours trop peu ambitieux », et insisté sur « une date limite pour l’arrêt de l’utilisation des énergies fossiles, sans quoi le texte sera trop faible ». La journée d’hier a également été marquée par un discours très écouté du secrétaire d’ État américain John Kerry, prononcé juste avant la distribution du nouveau texte par M. Fabius. Dans un cadre de critiques aux pays développés sur fond de leurs engagements (insuffisants ou flous) de financement, M. Kerry a annoncé que les États-Unis « doublent leur budget alloué aux efforts d’adaptation dans les pays en développement ». Il a plaidé pour un accord « ambitieux », tout en précisant qu’il devait être « flexible » pour s’adapter aux circonstances des pays, des circonstances qui pourraient être changeantes. Flexible pourrait signifier non contraignant, mais le secrétaire d’État américain s’est dit attaché à l’idée d’une révision régulière des engagements des pays, pour calculer les progrès. Quoi qu’il en soit, la journée d’aujourd’hui devrait être décisive : le sommet doit, en principe, être bouclé par la conclusion d’un accord, demain vendredi, à 18h. Débouchera-t-il sur l’accord prévu, global, ambitieux, de lutte contre le changement climatique ?

Source: lorientlejour.com/

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